Né en 1953 à Saïda, Algérie.
Vit et travaille à Paris.
Jean-Michel Alberola participe aux premières manifestations de la Figuration libre à Paris et à la Biennale de Venise de 1982. S’il est toujours question de peinture et de figure dans son œuvre, celle-ci est liée depuis à des cheminements moins attendus, plus difficilement cernables, des formes et attitudes variées. Dans la lignée des conceptuels, il utilise tout azimut photographies, cartes postales, objets trouvés, films et textes, tout en conservant la posture du peintre. Il mêle savoir-faire et connaissance de l’histoire de la peinture pour nous parler de la provenance de la toile à travers la discontinuité du récit. D’une toile d’abord séduisante et sur laquelle il revient inlassablement, consacrée à la religion avec notamment la figure emblématique de Suzanne et les vieillards, au mythe avec Diane et Actéon, il construit depuis 1982 une mythologie personnelle. D’après l’histoire, Actéon est mort pour avoir vu ce qu’il n’aurait pas dû voir. L’appropriation de ce nom par l’artiste manifeste une volonté de mêler l’histoire de la peinture et la sienne. Il ne veut pas distinguer, refuse toute hiérarchie entre les éléments qui composent son œuvre, les pensées et choses accumulées dans son atelier, les faits ou trouvailles glanés au gré de ses nombreux voyages. Onze ans après.

En 1987, Actéon signe onze aquarelles, onze photographies, onze visages identiques. Une façon peut-être de nous faire embrasser, et les circonstances des onze années qu’il vient de vivre, et l’héritage des années soixante-dix dont il inclut la parole : une période où l’image photographique relève aussi de l’objet trouvé, de la citation et où lui-même poursuit ses obsessions à travers toutes sortes d’images, dans un jeu d’accumulations questionnant à la fois le statut et les pouvoirs actuels de la peinture. De cette « intranquillité » naissent toujours plus de corps analysés (nombreuses crucifixions), de portraits, de paysages, et autant de carnets de dessins, de toiles et de citations, d’écrits et de livres d’artiste. Le temps se charge de l’insaisissable pendant que Jean-Michel Albérola médite sur les significations contemporaines des œuvres du passé (de Nicolas Poussin à Gustave Courbet, des frères Le Nain à Francis Bacon, d’Henri Matisse à Pablo Picasso, etc.). De la mort à la résurrection, du corps de l’artiste en morceaux à l’icône, comment remettre inlassablement en scène la peinture ? En la laissant signer elle-même son impureté, son excès, revendiquer la saturation et le désordre qui l’animeront toujours. « Plus abstraite est la vérité que tu veux enseigner, plus il te faudra séduire les sens en sa faveur. (1) » Anne Durez.

1. Friedrich Nietzsche (1886), Par-delà le bien et le mal, coll. Essais, Folio, Paris, 1987.